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20 avril 2013

EXPO ET AUTRES CURIOSITÉS | LE CHOEUR DU VILLAGE




Aujourd’hui on va  parler télé-réalité et architecture. Comment, peut-on associer les deux ? Et oui, France 3 a relevé le défi avec « Le Chœur du village ».
Cela vous dit quelque chose ? C’est une série de 6 épisodes dont les 3 premiers ont été diffusés lundi soir à 20h45. Si, comme nous, vous avez fait partie des 4,2 % de part d’audience.

DE QUOI ÇA PARLE ?

"Le Chœur du village' est un feuilleton du réel qui se déroule à Peyrehorade, un petit village du Sud-Ouest, à la frontière du Pays Basque et des Landes.
Il raconte l'histoire de villageois qui se mobilisent durant six mois pour transformer ensemble bénévolement un bâtiment – les anciens abattoirs du village laissés à l'abandon – en une école de musique pour tous. La municipalité ne pouvant assurer la totalité du financement de la rénovation, les bénévoles peuvent œuvrer de deux manières : soit sur le chantier, soit dans une chorale qui donne des concerts et dont les recettes servent à boucler le budget des travaux.
Mélanger « Tous ensembles » avec « N’oubliez pasles paroles » et rajoutez « Midi enFrance », mettre du croustillant, de l’émotion et un zeste de suspense (hoou j’ai peur) et vous obtenez l’émission en 100 jours de tournage.

Passionnant … Et bien, en tout cas, le projet est très intéressant. Non, pas le côté chorale (ils ont fait un super tube mais bon c’est moins notre kiff pour ce blog) du point de vue d’une expérience collective autour de la rénovation d’un édifice. Et voilà, entre effet média (et oui le montage vidéo peut transformer un message) et les caricatures de chantier (UNE architecte au milieu d’artisans « mâle »…) ça commence bien. On a voulu en savoir un peu plus sur les coulisses de l’émissions. Quoi de mieux que de prendre directement nos sources auprès de l’architecte elle-même, Isabelle Joly… rendez-vous téléphonique pris à nos clavier, on y va.


GENÈSE DU PROJET

Tout projet de réhabilitation public, me direz-vous, vient du maître d’ouvrage logique. Et bien non, c’est France 3 qui a lancé un appel aux communes pour la réalisation d’un tel projet. La commune de Peyrehorade possédait un projet au fond du placard qui pouvait correspondre et a profité de cette opportunité pour le réaliser. Isabelle Joly a eu un peu plus tard la surprise d’un appel de la direction de France 3 lui proposant de participer au projet. Concevoir, réaliser et finaliser des travaux en 4 mois avec l’aide de bénévoles (amateurs) et de quelques professionnels non sensibilisés au patrimoine, un vrai défi. Elle accepte très vite son rôle, trouvant le projet original, convivial et fort intéressant.
(via)

UN CHANTIER D'UNE VALEUR PATRIMONIALE AU STATUT COMPLIQUÉ

Le projet est la réhabilitation d’un ancien abattoir datant des années 1920. De style Art-Déco, le bâtiment témoigne, par son mouvement architectural, de la création des stations balnéaires de la région comme par exemple les villes de Biarritz,Guéthary, St Jean de Luz ou celle de Bayonne. L’édifice est en béton, il possédait, à l’origine, une toiture terrasse très vite recouverte par une charpente à 4 pans suite à de probables infiltrations.
Les abattoirs appartiennent à la commune de Peyrehorade dans le département des Landes mais se situent sur la commune d’Oeyregave, ce qui n’est pas pour simplifier les procédures administratives.
L’édifice est un bâtiment non classé, mais d’une valeur patrimoniale certaine par son style architectural innovant et le sentiment d'appartenance de la population. Toutefois, il fait parti d’un périmètre de protection de 500m d’un Monument Historique : le château de Peyrehorade ce qui oblige un avis conforme de l’Architecte des Bâtiments de France (ABF). Autre difficulté, le terrain est en zone inondable.

DÉROULEMENT DU CHANTIER

La difficulté majeur du chantier, se sont les délais imposés par la production France 3 de 100 jours qui ont été la contrainte principale. Il a fallu gérer “tout en même temps” : la conception, la procédure administrative et la gestion du chantier.
Dans le film, on voit la réunion de présentation du permis de construire à la municipalité sachant que les travaux ont déjà commencé. Une certaine incompréhension s’installe entre le chef de chantier et l’architecte. Cette dernière semble être là  un peu par nécessité juridique plutôt que pour ses compétences en tant  qu'architecte du patrimoine. Elle semble en effet avoir saisie l’âme du bâtiment avec une démarche économique en réutilisant les matériaux en bon état existant. Le chef de chantier, choisi par la production, a du mal au début à comprendre ses idées. Mais, très vite, chacun fait des concessions et un respect mutuel s’installe.

Promis, le chantier se finit dans les temps, vous pourrez regarder la suite de cette aventure lundi 22 avril à 20h45 sur la chaîne France3 (ça, on là assez dit).

LE RESSENTI D'ISABELLE JOLY

Nous avons voulu savoir ce qu'en pensait l’architecte pour avoir sa version de l’expérience.
Tout d’abord, elle ne regrette pas d’avoir participé à ce projet qu'elle trouvait, dès le départ innovant dans le domaine de la télé-réalité car non-nombriliste et tourné sur l’aspect collectif.
Elle s’est vite rendu compte de la grande implication de la production France 3 qui a dirigé en imposant les délais mais aussi les différents intervenants même professionnels. Cette dernière n’a pas pris en compte les impacts environnementaux, patrimoniaux et les délais des marchés publics (mise en concurrence) qu'implique une procédure ordinaire.
réunion de chantier (via)
L’architecte s’est confrontée à des choix pris sans son aval, ce qui l’a mis en porte-à-faux entre ses responsabilités, les délais à respecter et l’effet médiatique. Les décisions finales qu'elle a prise ont privilégié l’usage du bâtiment : une utilisation d’un édifice contribue à sa conservation et elle a veillé à la réversibilité des interventions entreprises (exemples des volets et de la mezzanine).

Nous lui avons demandé si elle trouvait l’émission fidèle à la réalité. Sa réponse : oui, elle représente la réalité mais le montage a scénarisé les faits et a modifié le message initial. Certains passages ont été coupés, dont ceux où elle explique le projet et ses décisions. Si, elle impose des consignes de sécurité et des réglementations à respecter, ce n’est pas dans le but de ralentir le chantier. En cela, le rôle de l’architecte est caricaturé et montre une image peu valorisante. La production de France 3 a tout fait pour appuyer cette image, allant même jusqu’à demander aux intervenants de se critiquer les uns aux autres. Après la diffusion des 3 premiers épisodes, elle a été un peu déçue du résultat et se questionne sur l’impact auprès de ses confrères et du public.

CONCLUSION

Alors, est-ce une émission télé ou un projet d’archi? Au vue de le prise en compte des réalités du monde de la construction (demande administratives, délais), on penche clairement pour de la communication télévisuelle. Cependant, nous constatons que le projet à lui, bel et bien été traité malgré ces contraintes. Nous regrettons que cette émission n’est pas été un support pour la valorisation du patrimoine mais un prétexte pour la réalisation d’un projet musical.

Pour nous, l’architecte a eu un comportement très professionnel. En rien elle ne déshonore la profession de notre point de vue. Mais, pour le grand public, ce n’est pas gagné !

Et vous qu’en pensez-vous ?

Merci à Isabelle Joly, qui a pris le temps de nous répondre.

Pour voir ou revoir l’émission : ici

Aurore B. et Laure B.

2 commentaires:

  1. Enfin Vis[LE] s'émancipe pour devenir adulte, abandonnant la communication seulement visuelle pour avoir une réflexion de fond sur l'acte de batir. Il faudra trouver l'équilibre entre les deux pour satisfaire la multiplicité de l'expression architecturale, c'est un premier pas encourageant mais il est difficile de s'impliquer personnellement comme acteur de son environnement et porter un regard critique sur la production.C'est pourtant la reflexion qui permet l'évolution.

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  2. @ Laure et Aurore: L'article est très intéressant et permet enfin de voir les coulisses de ce genre d'émission qui sont largement critiquables quand on connait les réalités des temps de réflexions et d'exécution des projets, comme pour les maçons du coeur ou même DECO... La rapidité des chantiers est toujours douteuse, ou encore le style donné aux maisons redécorées est toujours stéréotypé... L'un des plus grands scandales est le présentateur de TF* qui vient faire son beau sur le plateau et tenir la truelle au moment du passage de la caméra... alors qu'il n'y connait sans doute rien.
    A voir comment ce bâtiment finira pour ce village. En tout cas, c'est toujours chouette de voir des projets communautaires de ce genre et merci à Isabelle Joly pour son retour d'expérience.

    @Daniel : il est vrai que les articles sont inégaux. Cela vient notamment du fait que le blog n'est pas notre activité première, des sujets que nous souhaitons abordés individuellement et du type de rubriques dans lequel l'article s'intègre où le contenu n'est pas traité de la même manière. La diversité de nos spécialisations (archi, urba, géo, théorie, patrimoine) fait que la question de l'acte de bâtir n'est qu'un sujet parmi d'autre autour de la question de la démocratisation de la ville et des différents territoires urbanisés, qui est le cadre fédérateur de notre collectif. Nous essayons d'avoir un certain équilibre depuis 3 ans entre article de fond, initiation à la curiosité, et mise en valeur de manière simple des composantes de la ville.
    En tout cas, si il y a des articles que vous souhaitez voir approfondis, ou si vous voulez écrire des articles pour continuer dans cette dynamique, n'hésitez pas à nous contacter. Nous sommes très friands de ce genre de remarques pour améliorer notre contenu et les nouvelles contributions sont toujours les bienvenues.

    - charline -

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