26 avril 2012

SECRETS DES VILLES | LES BERGES DU RHONE


Pour vous mettre l'eau à la bouche Raphael vous a concocté un article spécial pour la semaine de notre second anniversaire qui se fêteras le samedi 28 avril sur les berges du Rhône!


Portrait historique du projet 

« Associé aux paysages changeants dont il est l’artère vivante, chargé de mystère de ses augustes origines, sortant des brumes pour se ruer à la conquête des terres bénies que baigne la mer toujours bleue et qu’illumine un ciel presque toujours clair, il fascine et retient. Lorsqu’on est homme du Rhône, on reste marqué par lui et, même éloigné par les hasards de la vie, on rêve de sa grandeur et l’on reste, au plus profond de soi, rattaché à tout ce que ses eaux semblent apporter de libre et de fier. Les hommes qui sont installés sur ses bords ont toujours voulu entrer dans sa familiarité ; ils ont désiré l’associer à leur modes d’existence et, même accrochés à ses rives, menacés et vaincus, ils ont toujours gardé une place dans l’intimité de leur cœur et les vagabondages de leur imagination » (Faucher, 1968)

Le Grand Lyon, maitre d’ouvrage pour l’aménagement des bas-ports de la rive gauche de l’arc du Rhône, lance en 2001 un cahier des charges élaboré avec le soutien de l’Agence d’Urbanisme de Lyon. Un marché de définition est effectué en 2002 respectant les principes du Plan Bleu (1991) à savoir : concevoir un cheminement libre capable d’accueillir des continuités piétonnes et cyclables, prévoir des emplacements pour les bateaux,  faciliter l’accès aux quais, pouvoir être en mesure d’amortir les inondations… le site doit aussi répondre à une double échelle : celle de l’agglomération et celle du quartier. 
Emmanuelle  Sibué-Allart, chef de projet Grand Lyon au service espace public précise que « Les objectifs du projet étaient multiples : il s’agissait tout d’abord de libérer  le site des voitures, de permettre aux habitants de retrouver un contact direct  avec le fleuve et de créer un espace de nature et de détente en plein cœur  de la ville. L’aménagement tire ainsi profit d’un lieu riche de potentialités en termes de qualité de vie et jusqu’ici peu exploité. En effet, les Berges du Rhône sont particulièrement centrales et offrent un point de vue unique sur Lyon » (lettre d’information n°7 de mai 2007). C’est un groupement composé l’atelier paysagiste lyonnais In Situ (Annie Tardivon et Emmanuel Jalbert), et les co-traitants Jourda (architecture) et Coup d’Eclat (éclairagiste). Une  phase de consultation prend place l’année suivante et la construction commence en 2005 par des travaux fluviaux. Les larges bandes de stationnement présentes à l’époque sont détruites au profit de nouvelles berges de 5 km et d’une superficie de 10 ha. 
En 2007 les berges du Rhône s’ouvrent au public avec des festivités (théatre de rue, spectacle sur le fleuve…).

Avant  (Grand Lyon et Google Earth images)
Pendant (Grand Lyon et Google Earth images)
Après (Grand Lyon et Google Earth images)

Image du lieu 
Les berges de la rive gauche du Rhône constituent un élément fort de l’image de Lyon. Véhiculant une image accueillante et conviviale les habitants ont adopté ce nouvel espace de respiration pour leurs loisirs quel que soit leur âge.

Les berges sont organisées autour de neuf séquences dessinées par la géographie du fleuve et variables en fonction du lieu traversé : du plus naturel au Nord et Sud, au plus urbain et minéral au cœur de l’aménagement. La continuité est assurée par une frise végétale (arbres de tiges et graminées) plus ou moins accentuée. Ce double caractère, à la fois urbain et naturel place les berges a la fois dans et hors la ville.

(Google Earth images)

Espaces publics 

Piétons et cyclistes ont chacun leur espace de circulation grâce à un revêtement différent. Des aires de jeux, skate parks, prairies, terrain de boules et de nombreux bancs pour contempler le paysage ont été installé. Mention spécial à la lame d’eau très linéaire de 400m qui est une façon de rendre l’eau du Rhône directement accessible.
L’adoption des espaces publics ne s’est pas fait attendre comme en témoigne Annie Tardivon, maitre d’œuvre sur le projet : « cette forte fréquentations nous a un peu inquiétés d’abord pendant la période de chantier. C’est un chantier que nous avons eut énormément de mal a clôturer : systématiquement le vendredi, les clôtures étaient renversées et les gens prenaient possession des lieux le week-end »
Cette rapide adoption des lieux n’est pas surprenante tant le site est spectaculaire et que la conception du quai est soignée et simple, donc lisible par tous. L’opposition politique a d’ailleurs critiqué l’aspect minimaliste du projet et son côté minéral dominant par rapport à la végétation.

La lame d’eau (Google Earth images)
« Un parc urbain au fil de l’eau » (dépliant du Grand Lyon)

Accessibilité / perméabilité 

La position centrale des berges dans la ville facilite la convergence en ce lieu (à la différence de Confluence par exemple). L’étendue de l’aménagement est telle qu’une multitude de transports en commun desservent la zones de manière très rythmée (bus, tram, métro à moins de 300m). Une dizaine de station de Vélo’v complètent le dispositif. Il ne reste plus à la ville que d’adopter une offre de transports fluviaux à l’image des water taxis de New York, élément encore inexistant à Lyon.
Cet ambitieux chantier a vu la réalisation d’une voie végétale et minérale permettant de longer le Rhône à pied, en cycles, ou même chaussé de rollers. L’accent est mis sur les modes de déplacements doux : un usager peut ainsi aller de Gerland à Miribel sans prendre sa voiture. C’est aussi un lieu de passage intense entre l’Est et l’Ouest de Lyon car il est pris en tenaille entre le cœur économique de la ville avec la Part Dieu, et le centre administratif et historique. Les traversées d’Est en Ouest sont assurées par dix ponts (dont un réservé à la SNCF).
La voiture est présente le long du fleuve (le sens de circulation est le même que le sens de l’écoulement du Rhône) mais seulement sur les quais hauts afin de sectoriser les flux et de permettre aux automobilistes de rejoindre les parkings. Les parkings sont d’ailleurs un enjeu fort du projet car la suppression des parkings sur les quais présent jusqu’en 2005, menaçait de nuire à l’activité commerciale des abords du fleuve. Ainsi deux parkings constitués de 1175 places ont été créés en renfort des traditionnels stationnements en créneau de part et d’autre de la chaussée. Le nombre de places a baissé en concordance avec la politique de la ville de réduire l’automobile en ville. doublé d’une hausse des prix, les populations font le choix de venir par un autre mode de transport

Vélo’v en attente (Google Earth images)
Perméabilité (Agence d’Urbanisme de Lyon)

Mixité des fonctions 

« Une étude sociologique a été réalisée avant même la conception  du projet. Les résultats ont souligné que malgré la présence des voitures,  des usages sous-jacents préexistaient sur les Berges du Rhône, notamment  la promenade, le vélo ou la détente de proximité vers la Guillotière. Le principe d’aménagement porté par les paysagistes d’« In Situ » s’est positionné  en renforcement de ces activités, tout en laissant la possibilité aux habitants  d’enrichir le projet grâce à la concertation, pour créer un espace public  conforme aux attentes du plus grand nombre. Aujourd’hui, nous faisons donc  le pari d’une cohabitation réussie entre ces différents usages et modes  de déplacement » Emmanuelle Sibué-Allart, chef de projet Grand Lyon, service espace public.

Les berges du Rhône sont avant tout dédiées aux loisirs, qu’ils soient ralentis et donc propices à la détente, à la promenade, à la quiétude… ou alors accélérés pour les sportifs (course à pied, parcours de santé, vélo, football, volleyball, roller, skate…). 
Une offre de commerces de bouche a ouvert près des ponts de Wilson et de Lafayette, sans oublier les nombreuses péniches qui abritent des restaurants, des cafés, des night clubs mais aussi des chambres d’hôtes qui offrent aux berges une vie aussi bien diurne que nocturne. Bien sûr, sur le quai haut, une myriade de commerces dispose d’une vitrine qui donne sur les quais. Des inquiétudes ont émergé avec l’infatigable argument de la disparition des parkings : « zéro voiture, zéro client, c’est la mort des commerces en centre-ville » (Le Figaro du 07/03/03  Le projet d’aménagement des berges du Rhône s’expose à la galerie des Terreaux : Une rive à suivre). Mais la fréquantation est telle, que cet argument n’est plus recevable aujourd’hui.

Aucun logement n’a fait partie du projet, mais des gens vivent et habitent sur des péniches. Là encore, les logements sont situés au-dessus des commerces sur le quai haut.
Or, même si le site et le programme ne pouvaient pas supporter une mixité de toutes les fonctions de la ville, comme le logement, le commerce, le projet aurait mérité un plus fort rattachement aux quartiers qu’il traverse. Malgré les accès qui sont nombreux, ce projet de berges ne propose pas de liaisons privilégiées avec certains centres urbains. Le plan du Grand Lyon (ci-dessus) est très explicite sur ce point, en effet les berges sont représentées hors contexte, si ce n’est les rues qui les bordent.

Activités accélérées ou ralenties à différents endroits du rivage (photos de l’Agence d’Urbanisme de Lyon)

Activités accélérées ou ralenties à différents endroits du rivage (photos de l’Agence d’Urbanisme de Lyon)

Flexibilité 

S’intégrant dans la trame verte et bleue de la ville de Lyon, le nouvel aménagement des berges du Rhône crée de nouvelles pratiques au cœur de la ville.
Le projet comme nous l’avons déjà vu reste sobre : il propose des espaces dédiés à certaines activités, mais laisse une large place à l’espace public multifonctionnel, on peut donc espérer que les usages vont se multiplier et se diversifier. De plus, rien n’empêche l’établissement de nouveaux aménagements, qui viendraient redonner du lien entre cet espace et la ville. Finalement l’espace étant séquencé en neuf tranches, la mutation de l’une sans grand impact sur les autres est envisageable.



Ecrit par : Raphael B.

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