17 avril 2012

EXPOS ET AUTRES CURIOSITÉS | DIALOGUE DANS LE NOIR



Il n’est pas nécessaire de regarder pour voir loin

J’ai eut l’occasion durant mon année d’Erasmus à Milan de visiter l’exposition « dialogo nel buio », ce qui signifie « dialogue dans le noir». Une exposition particulière, puisqu’on ne voit rien.
En fait, plutôt qu’une exposition, c’est un parcours que l’on vit pendant environ une heure, dans le noir total. Pour nous accompagner dans cette expérience, une personne non voyante nous parle et nous tient parfois le bras. Elle nous demande nos prénoms au début et arrive à nous reconnaître tout le long du parcours !
La balade commence est c’est assez déstabilisant. Le fait de ne pas voir les autres, me donne l’impression d’être seule. En petit groupe, nous nous suivons dans le noir. Les consignes : poser la main droite sur le mur pour avancer. Il est vrai que sans le mur, on est perdu. Par exemple, s’il faut faire demi-tour, comment faire autrement que de re-suivre le mur dans l’autre sens ? même si ce n’est pas le chemin le plus court.
Dans l’autre main nous tenons une canne, ce qui nous permet de repérer les reliefs du sol et les obstacles.
Des exercices sont disposés dans chaque pièce pour tester nos autres sens : des bruits, des odeurs et des objets à toucher. Et bien qu’il est dur de reconnaître un objet sans le voir ! Il faut l’avoir touché et tourné dans tout les sens avant de reconnaître ce que c’est. Une réelle expérience de re-découverte.
Nous avons ainsi testé un grand panel d’univers : de la campagne à la mer nous avons embarquer dans un bateau qui tanguait, nous avons eut des atmosphère calme et d’autre ventée, …
A la fin, direction le bar, mais toujours dans le noir…et voilà que verser du jus dans un verre devient une affaire très compliquée. Mais cela nous permet de tester notre dernier sens : le goût !


Origine de cette exposition

L’idée est venue d’un journaliste allemand. Il s’est retrouvé à travailler pour la première fois avec une personne aveugle. Il va se rendre compte que la vie de cet homme n’est pas triste et refermée comme il l’avait imaginé, mais au contraire riche de sensation et de curiosité vers le monde. Il souhaite alors faire partager cette rencontre qui a cassé ses préjugés.
La première exposition se tient à Frankfort en 1988. Ce sera un succès qui sera repris en Europe et dans le monde.
A Paris, il existe un restaurant où l’on mange dans le noir. Une expérience sûrement étonnante, car le visuel des plats nous influence fortement.


Adaptation de l’espace urbain

Suite aux discussions avec ces personnes mal voyantes, je me suis questionnée sur les moyens d’adapter l’environnement urbain à leurs déplacements. J’avais déjà remarqué les petits points en reliefs qui se trouvent au niveau des passages piétons (bandes d'éveil de vigilance). Il existe aussi l’avertissement sonore, signalant que l’on peut traverser. Mais comment font-ils pour savoir où ils vont ? Les personnes malvoyantes racontaient qu’elles avaient un parcours précis qu’elles reproduisaient. Parfois ils allaient un peu plus loin pour compléter leur « plan mental ». A chaque nouveau parcours leur plan s’agrandit. L’école d’ingénieur de Genève a inventé un plan imprimé en relief par thermogonflage. Par le touché les personnes mémorise l’espace urbain. Un autre dispositif propose un plan en relief (d’un quartier ou d’une ville) posé sur une tablette tactile. A la pression du doigt des commentaires sonores indiquent le nom des rues, des carrefours et des points d'intérêt. Grâce à un système de navigation très ergonomique, plusieurs fonctions sont activables : orientation, itinéraires et transports publics.

 
Bilan

Le noir est une manière de tester les choses sans appréhension. Je me suis rendue compte à quel point on se fie à sa vue. Ici j’ai découvert une autre manière de voir la réalité. J’ai expérimenté le potentiel des autres sens que l’on met souvent de côté.
Ce dialogue entre le monde des voyants et celui des non-voyants a été très enrichissant, car d’habitude ce sont les voyants qui aident les non-voyants à traverser une rue et ici c’est nous qui nous faisions aider. Nous faisions entièrement confiance à la guide, qui par sa voie et ses gestes, était nos yeux.
Cela m’a aussi permis de me rendre compte qu’en tant que concepteurs de bâtiments et d’espaces urbains, nous avions un rôle à jouer.

« Voici mon secret. Il est très simple: on ne voit bien qu'avec le cœur. L'essentiel est invisible pour les yeux », paroles du renard dans le Petit Prince.

Site de l'exposition: dialogo nel buio

Écrit par : Aurore B.

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